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Au secours, mon enfant se sépare !

Printemps 2017. Depuis quelques semaines, Solange, retraitée de l’éducation nationale, se sent mieux. Ses douleurs articulaires ont disparu, elle a retrouvé l’appétit et l’envie de voir ses amies. A chaque pas, son corps sécrète des hormones du bonheur, depuis que sa fille unique, Claire, 36 ans, lui a annoncé qu’elle allait se marier (les témoins interrogés pour cet article ont souhaité garder l’anonymat) et lui confie régulièrement des petites missions de prospection, qu’il s’agisse de trouver un traiteur ou des boutiques de robes de mariée. Mais ses recherches et le ravissement qui va avec s’arrêtent net, quand, le matin du 23 avril 2017, Claire lui confie qu’elle a rencontré quelqu’un lors d’une avant-première et, de ce fait, annule les noces. « Ç’a été un choc, se souvient sa mère. Pendant quatre ans, on avait appris à apprécier les qualités du futur marié. Ils vivaient ensemble, et puis plouf ! »
Beaucoup de choses lui échappent. Pourquoi sa fille fait-elle volte-face après l’avoir narguée toutes ces années avec son couple « zéro-dispute » ? « Avec mon mari, on a refait le film, et on s’est dit qu’elle avait dû tomber sur une célébrité qui lui avait fait tourner la tête… » Déçue de la tournure des événements, Solange entreprend de remettre sa fille sur des rails, en lui rappelant les peines causées par ses précédents coups de tête. « Les séparations, c’est souvent des moments qui précarisent un peu, je craignais de la voir à nouveau passer par une période de transition qui la fragiliserait, justifie-t-elle. Comme beaucoup de mes amies de mon âge [autour de 70 ans], je considère que vivre avec quelqu’un est une assistance mutuelle. » Une étude de l’Insee de 2021 estime que les femmes subissent une baisse de 20 % de leur niveau de vie l’année de la séparation, soit presque trois fois plus que les hommes (7 %).
Quelques jours plus tard, les tensions grimpent. Lorsque Claire demande à ses parents de l’héberger le temps de trouver un nouvel appartement, ces derniers lui tournent le dos. « Vis-à-vis de son ex-compagnon, nous ne souhaitions pas prendre parti en l’accueillant à la maison, explique son père. Il fallait qu’elle assume ses choix, quitte à aller vivre dans une chambre de bonne. Et puis, je ne voulais pas d’un défilé de mecs à la maison… »
Face à cette tempête d’amertume, Claire coupe les ponts. Plongée dans un profond chagrin, sa mère passe ses journées au lit, ce qui finit par inquiéter ses proches. « Mes parents m’ont rendu la vie impossible, dit Claire aujourd’hui. Alors que je devais gérer ma séparation, ils en ont fait un drame personnel accompagné de multiples reproches. Aveuglés par leurs a priori, ils n’ont même pas vu que j’étais soulagée d’avoir pris cette décision. Leur réaction m’a donné une bonne leçon ! Depuis, je ne leur présente plus personne… au grand regret de ma mère. »
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